Le DGS acteur du fonctionnement participatif
22 mai 2021
L’équipe de Fréquence Commune était à Plouguerneau (Finistère) pour accompagner l’équipe d’élu•e•s dans la construction de leur nouveau schéma de fonctionnement interne, basé sur la gouvernance partagée.
François Gardin, le nouveau Directeur Général des Services de Plouguerneau a participé à cette formation. Ce nouveau fonctionnement accentue la collégialité dans la prise de décision. Les rapports entre le politique et l’administration s’en retrouvent donc modifiés et le fonctionnement ordinaire du binôme maire/DGS bousculé. François se sent pleinement acteur de la construction de ce nouvelles pratiques municipales. Il nous raconte ...
« Je n’aurais pas postulé ailleurs qu’à Plouguerneau » dit le nouveau Directeur Général des Services (DGS) arrivé en septembre 2020 dans cette commune de 6 600 habitants qui borde la Manche sur 45km de côtes, au nord-ouest du Finistère.
L’aventure participative a commencé en 2014 à Plouguerneau. En 2020, la liste renouvelée continue avec le même maire mais avec un nouveau Directeur Général des Services, François. Le schéma de fonctionnement interne de ce nouveau mandat, basé sur la gouvernance partagée, accentue la collégialité dans la prise de décision. Les rapports entre le politique et l’administration sont modifiés, le fonctionnement ordinaire du binôme maire/DG bousculé. Voici ce qu’en dit François, le DGS, après avoir participé à la formation de Fréquence Commune « Démocratie interne ». Interview.
« Il y avait deux choses qui m’intéressaient à Plouguerneau. D’abord, la volonté d’engager concrètement la transition écologique sur le territoire. Ensuite, l’esprit de coopération, cette façon d’être en “mode ouvert” sur les autres et sur le monde. Cette façon de faire a nécessairement un impact sur les services et les agents.
Par ailleurs, j’avais besoin de retrouver le service public de base, du quotidien, dans un lien direct avec les élu∙e∙s, après une expérience décevante dans une plus grande administration, où le penser et le faire « autrement » trouvait difficilement sa place et où le contact avec les élu‧e‧s était moins fréquent.
Metteur en scène du scénario politique municipal
Mon rôle est de comprendre les volontés politiques, de proposer des options puis, une fois celle choisie, de la mettre en œuvre. Je me vois comme une courroie entre les élu∙e∙s et les services.
J’ai beaucoup de respect pour le rôle d’élu∙e. Je dois leur permettre de prendre une décision en toute connaissance de cause, puis de garantir sa bonne exécution. Je ne m’interdis pas de donner mon avis mais je respecte la décision finale.
Une gouvernance clarifiée qui facilite le rôle du DGS
Quand je suis arrivé, j’ai constaté que chaque élu∙e avait une délégation. J’ai trouvé ça responsabilisant, positif pour la démocratie représentative. Mais je me suis aussi rendu compte que cela générait plus de travail de compréhension et d’analyse (car plus d’idées et plus de projets), plus d’ajustement et de suivi et beaucoup d’échanges entre eux, sans nécessairement qu’une position claire n’émerge, ce qui pouvait déstabiliser les services et me mettre en difficulté. Or, parce qu’il faut trouver un équilibre permanent entre collégialité et efficacité, ce fonctionnement nécessite plus de méthode que dans un système municipal classique. Cette formation sur la démocratie interne est donc arrivée au bon moment. Elle sera utile pour permettre aux élus de prendre des décisions, au bon niveau, ce qui facilitera mon travail.
Lors de cette formation, j’ai posé la question du rôle du maire, car il est mon binôme de travail. Avec le fonctionnement collégial souhaité par cette majorité, j’ai l’impression que le maire devient un primus inter pares (NDLR : désigne une personne qui préside une assemblée sans avoir de pouvoirs propres), hormis concernant le pilotage des RH, l’ordre public, l’état civil, etc. Mais reste-t-il quand même le coordinateur principal qui fait émerger la décision (stratégique) ? Sur les grands enjeux/dossiers ou en cas de blocage, j’ai besoin d’un système qui donne régulièrement, dans la mesure du possible, une position claire et valide des options. C’est pourquoi la définition de règles, de rôles et de circuits de décision est fondamentale.
Le DGS, pilote d’une transformation des services ?
En tant que DGS, je fais naturellement confiance car je présume que les encadrants et les agents sont professionnels et assument leurs responsabilités au quotidien dans la gestion des projets et des activités ; et je les incite régulièrement à proposer, innover, prendre des risques, faire des erreurs (pas trop graves quand même…). De même, tous les problèmes n’ont pas vocation à être remontés à mon niveau. Mais si je ne veux pas intervenir sur tout, je dois néanmoins m’assurer que ce qui est fait va dans le sens des orientations politiques, ne met pas en difficulté la collectivité sur le plan juridique ou est soutenable financièrement, etc..
Est-ce que l’administration communale, soit une centaine d’agents, pourrait basculer totalement en mode horizontal ? Je ne suis pas encore convaincu. L’efficacité et l’équité pourraient en pâtir. Il faut donc à mon avis y aller progressivement, et tester si besoin.
La pratique collégiale des élus facilite l’expérimentation managériale
Nous vivons actuellement une expérience intéressante à la direction des services techniques que je regarde avec beaucoup d’attention. Il n’y a plus de chef du service bâtiment ; les agents s’organisent de manière autonome, font appel au directeur si besoin mais ils planifient eux-mêmes le travail. Et nous constatons une efficacité réelle. A voir donc si cela peut être dupliqué.
Pour revenir aux élus, j’adhère totalement à cette nouvelle façon de faire vivre la démocratie au niveau local à Plouguerneau. Les élu∙e∙s souhaitent prendre des décisions collectivement et ouvrir la mairie à la participation des habitants. En expérimentant tout cela, ils‧elles explorent de nouvelles manières de produire de la décision collective au service de l’intérêt général ; cela construit progressivement un savoir-faire et avec le temps le fonctionnement deviendra plus performant. Ils‧elles sont vraiment conscients que que c’est actuellement perfectible. Avec un peu de discipline et de rigueur, nous allons arriver à construire des choses très inspirantes à Plouguerneau ! Je me sens donc pleinement acteur de la construction de ce nouveau fonctionnement municipal.
Article rédigé par Théa Disdier-Haumesser, bénévole de la coopérative