Assemblée citoyenne de Poitiers : lancement du groupe de proposition
15 février 2023
L’Assemblée citoyenne et populaire de Poitiers s’est saisie de la question des incivilités dans l’espace public en décembre 2022. Ces travaux vont déboucher sur des propositions concrètes d’action. On vous raconte comment ça fonctionne !
Article écrit par Mathilde HOUZE et Thomas SIMON
A lire (les étapes précédentes) : Les incivilités : un sujet inattendu pour l’Assemblée citoyenne et populaire de Poitiers.
Les travaux de l’Assemblée devront déboucher sur des propositions concrètes d’action adressées à la municipalité en octobre 2023.
Lors de la soirée d’accueil des 100 habitants tirés au sort le 17 janvier dernier, 20 personnes se sont portées volontaires pour participer aux 13 réunions du groupe de proposition (GP) jusqu’en octobre prochain.
Le groupe de proposition prépare les travaux et décisions prises par l’Assemblée qui se réunira les 4 mars, 3 juin et 14 octobre.
D’ici la première assemblée, le samedi 4 mars, le groupe de proposition a pour mission :
- d’identifier les différents enjeux que soulèvent les incivilités dans l’espace public à Poitiers,
- de soumettre au vote de l’Assemblée des problématiques qui pourraient être traitées.
Pour vous permettre de suivre l’avancée du groupe de proposition, on vous raconte pas à pas la façon dont ses membres travaillent et les résultats qui en découlent.
Groupe de proposition #1
La première réunion du groupe de proposition s’est tenue le mardi 24 janvier de 18h à 21h. 20 habitants volontaires étaient présents ainsi que 4 élus et 5 agents de la ville.
Les objectifs de cette première séance de travail étaient de :
- permettre aux personnes présentes d’apprendre à se connaître,
- clarifier le cadre de travail,
- identifier collectivement les différentes formes d’incivilités rencontrées dans l’espace public de Poitiers.
Le groupe de proposition se retrouvera à 13 reprises au cours des 9 prochains mois. Il est donc important que ses membres aient envie de travailler ensemble, prennent du plaisir à partager leurs idées et soient collectivement constructifs.
Pour créer des conditions propices à un travail efficace et coopératif au sein du groupe, un temps d’interconnaissance a d’abord été proposé. Par petits groupes de 3 personnes, chacun des membres a pu partager en 5 minutes les raisons qui l’ont amené à rejoindre le groupe des 100 membres permanents et à se porter volontaire pour le groupe de proposition. Si pour certains membres c’est le sujet des incivilités qui les ont mobilisé, pour d’autres, c’est la promesse d’une aventure démocratique qui a été déterminante.
Des règles de fonctionnement ont ensuite été proposées et validées. Ces règles doivent permettre à chaque membre de se sentir suffisamment en sécurité pour prendre la parole et partager des idées sans crainte du jugement des autres.
A quoi sert le groupe de proposition ?
Nous avons pris le temps de représenter le rôle du groupe de proposition et son articulation avec l’Assemblée.
Le groupe de proposition doit relever un défi au cours de ces 9 prochains mois : celui d’approfondir les enjeux et les solutions sur le sujet des incivilités, tout en offrant des orientations suffisamment larges pour que l’assemblée garde son pouvoir décisionnaire lorsqu’elle se réunira en mars, juin et octobre prochains.
Pour moi, l’incivilité dans l’espace public à Poitiers c’est…
Une fois le cadre de travail posé, nous voilà plongés au cœur du sujet. L’objectif de ce temps est de clarifier ce dont on parle quand on évoque les incivilités dans l’espace public à Poitiers. Pour cela, nous partons du vécu, des expériences et regards singuliers de chaque membre du groupe.
Chacun et chacune a pu partager sa vision en complétant la phrase avec autant d’idées qu’il ou elle souhaitait : Pour moi, l’incivilité dans l’espace public à Poitiers c’est…
Ce premier panorama confirme que le sujet des incivilités est vaste et peut être abordé de manières très différentes selon les personnes, son vécu, son histoire individuelle.
A partir de la diversité de ces idées, le groupe doit parvenir à des propositions de thématiques qui seront soumises au vote de l’assemblée du 4 mars 2023. Celle-ci retiendra une ou plusieurs de ces entrées sur lesquelles elle concentrera la suite de ses travaux.
Groupe de proposition #2
La deuxième réunion du groupe de proposition s’est tenue le mardi 31 janvier de 18h à 21h. Les 20 habitants volontaires étaient présents ainsi que 4 élus et 5 agents de la ville.
Cette deuxième séance de travail vise à :
- mieux appréhender la notion d’incivilité en prenant de la distance par rapport au vécu individuel (partagé lors de la première séance) avec un éclairage de chercheuses spécialisées sur le sujet des incivilités,
- élaborer des propositions de thèmes à traiter sur le sujet des incivilités en vue de l’assemblée du 4 mars.
Origine et usage de la notion d’incivilité avec Carole Gayet-Viaud
Pour aider le groupe à prendre du recul sur la thématique des incivilités nous avons visionné une courte vidéo de 5 minutes résumant le point de vue de Carole Gayet-Viaud, sociologue chercheuse au CNRS sur la thématique des incivilités.
Selon la chercheuse, “L’incivilité est une catégorie médiatique et politique aujourd’hui omniprésente, mais dont on peine à savoir ce qu’elle désigne. La recherche éclaire sur les phénomènes que recouvre le terme « d’incivilité », et les problèmes que posent son usage, dans son acception actuelle, étroitement articulée à la délinquance et à l’insécurité.”
Pour aller plus loin : Carole Gayet-Viaud, La civilité urbaine. Enquête sur les formes élémentaires de la coexistence démocratique. Economica « Etudes sociologiques », 2022
Après avoir visionné la vidéo les membres du groupe de proposition se sont mis par groupe de trois pour échanger sur deux questions : quelles questions cette vidéo me pose sur les incivilités et qu’ai-je besoin de savoir, de comprendre ?
De la lutte contre les incivilités à la ville accueillante avec Marie-Hélène Bacqué
Nous avons ensuite eu la chance d’échanger avec Marie-Hélène Bacqué en visioconférence. Marie-Hélène Bacqué est sociologue et urbaniste, professeure d’études urbaines à l’Université Paris-Nanterre, spécialiste des enjeux sociaux et politiques de la transformation urbaine et de la démocratie participative.
Marie-Hélène Bacqué questionne la production de la règle collective “Qui émet les règles ?”. A la lecture de la production de groupe de proposition en première séance, elle questionne la référence à des “groupes” de jeunes, assimilés rapidement à des délinquants. Travaillant en recherche participative avec ces publics, elle a tenté d’apporter un éclairage sur la non prise en compte de ces publics dans les débats et les décisions d’aménagement de l’espace public.
Elle a ensuite illustré d’autres formes de cohabitation dans l’espace public en prenant l’exemple québécois du concept d’accommodement raisonnable. C’est une expression québécoise qui désigne la tentative des sociétés modernes de s’accommoder des exigences des différentes minorités au sein de la société pour favoriser l’égalité des chances. L’accommodement raisonnable renvoie à l’idée d’un compromis temporaire, valable uniquement dans l’ici et le maintenant, qui n’entraîne pas de compromission chez les différentes parties prenantes, chacune acceptant le compromis au motif de la nécessité d’un vivre-ensemble.
Marie-Hélène Bacqué a terminé son propos en invitant le groupe de proposition à s’interroger sur la possibilité d’aborder positivement le sujet par la notion de ville accueillante : Quelles sont les conditions qui permettraient à la ville d’être accueillante pour tous et toutes ?
Quelles thématiques de travail proposer à l’assemblée du 4 mars ?
Suite à ces éclairages, nous avons proposé aux membres du groupe de s’organiser en petits groupes pour identifier une thématique qu’il souhaiterait soumettre à l’assemblée. Au terme de ces 2 premières séances de travail, 16 thématiques ont émergé. Certaines sont singulières, d’autres se recoupent entre elles. Certaines sont très larges, d’autres très spécifiques. Afin de permettre une délibération et un choix par l’assemblée, un travail est à réaliser pour obtenir des thématiques claires et équilibrées. Pour cela, un appel à volontaires est lancé : 3 membres se retrouveront avant la troisième session du groupe le 21 février et élaboreront l’offre de propositions de thématiques à destination de l’assemblée. .
Article écrit par Mathilde HOUZE et Thomas SIMON