Lundis en Commun #1 : Premier tour, et après ?
26 mars 2020
Lundi 23 mars 2020, 187 listes participatives et membres de collectifs citoyens se sont retrouvés dans le cadre d’une conférence en ligne. Après des élections municipales marquées par une crise sanitaire sans précédent et un taux d’abstention record, ce temps de rencontre en ligne a permis de faire le point sur ce premier tour, tout droit tiré d’un scénario de science fiction.
Lundi 23 mars 2020, 187 listes participatives et membres de collectifs citoyens se sont retrouvés dans le cadre d’une conférence en ligne organisée par Action Commune.
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Après des élections municipales marquées par une crise sanitaire sans précédent et un taux d’abstention record, ce temps de rencontre en ligne a permis de faire le point sur ce premier tour, tout droit tiré d’un scénario de science fiction. Le succès de cette conférence (près de 200 participants), a révélé qu’une mise en réseau des listes participatives entre elles était bienvenue et répondait à un besoin de mieux comprendre le contexte difficile dans lequel s’était déroulé le premier tour, le besoin de partager les expériences de chacun.e et de discuter des perspectives.
Après une présentation des résultats des listes participatives en France au 1er tour des élections municipales, les 187 participants se sont répartis en 5 ateliers animés par Elisabeth Dau, Tristan Rechid, Olivier Pastor, David Bodinier, Solenne Boiziau et Thomas Simon.
Atelier 1 : Ceux qui ont perdu et repensent leur mode d’action collective.
Atelier 2 : Ceux qui ont gagné au premier tour, comment réussir l’investiture dans ce contexte de crise ?
Atelier 3 : Élu.e.s dans l’opposition, quel rôle de contre-pouvoir citoyen au sein de la municipalité ?
Atelier 4 : Ceux qui vont au second tour, quelles stratégies ? Comment faire campagne en confinement ?
Atelier 5 : Repenser les stratégies municipalistes dans le contexte de crise actuel.
Voici le résumé des 5 ateliers :
Atelier 1 : Ceux qui ont perdu et repensent leur mode d’action collective.
- Le très fort taux d’abstention dû au COVID-19 a suscité beaucoup de frustrations chez les listes qui ont perdu au 1er tour.
- Beaucoup de participant.e.s (Montpellier, Brest, Paris 19°…) ont exprimé leur espoir que le premier tour de l’élection soit annulé en raison des circonstances exceptionnelles dans lesquelles s’est déroulé le scrutin, et considèrent que l’abstention historique leur a été défavorable.
- L’ensemble des listes partage la même préoccupation => Comment continuer à faire vivre le collectif en dehors de l’institution, hors du cadre électoral ?
- La plupart des collectifs témoignent d’une baisse de la mobilisation après la défaite au 1er tour, avec des scores parfois très bas (> 5%) qui entraîne bien souvent des difficultés financières. Un obstacle supplémentaire à l’animation du collectif.
- En raison du confinement, la plupart des listes participantes n’ont pas encore trouvé le moment pour faire le bilan de la campagne et se réunir pour discuter de l’après. Seul le collectif Nous Sommes a entamé ce chantier en créant trois groupes de travail : “Comprendre” (critique rétrospective des raisons de l’échec électoral), “Raconter” (centralisation et numérisation de toutes les ressources depuis la création du mouvement) et “Libérer la parole” (catalyseur des tensions et déceptions exprimées après la défaite).
- Pour continuer à alimenter la dynamique, les listes sont conscientes qu’il leur faut :
– occuper le terrain ;
– déployer de nouveaux outils (ex. : plateforme Decidim) ;
– se rassembler à nouveau autour de projets concrets ou de luttes locales : maison de la citoyenneté façon “Kirgensheim”, création de réseaux de collectifs au niveau intercommunal, forum ouvert sur la question de l’agriculture et commissions extra-municipales à Barjols, comité de quartier se positionnant en contre-pouvoir citoyen en l’absence de politique de démocratie participative à la Ville à Saint-Cyr-l’Ecole, recensement des initiatives locales en faveur de l’agro-alimentaire durable et l’éducation par le collectif de Mont-de-Marsan …
Les questions qui ressortent de l’atelier :
- Quels projets, quels outils pour rebondir après la défaite et faire vivre le collectif en-dehors de l’institution ?
- Quelle mobilisation imaginer autour des projets intercommunaux, avec ou sans d’autres collectifs des communes voisines ?
- Faut-il compter sur une annulation du 1er tour, et sinon comment se mobiliser pour se faire entendre à ce sujet ?
- Si report il y a, comment financer et mettre en place une nouvelle campagne ?
- Comment s’organiser et se mobiliser en cette période de confinement ? Comment agir face au COVID-19 au niveau local ?
Atelier 2 : Ceux qui ont gagné au premier tour, comment réussir l’investiture dans un contexte de crise ?
- Ressentis : certains sont frustrés de ne pas pouvoir prendre leurs fonctions dès maintenant et d’autres très surpris d’avoir été élus au premier tour.
- Globalement le contexte aide pour ceux qui ne sont pas forcément prêts, et frustrent ceux qui sont prêts depuis des mois.
- Le confinement et sa durée indéterminée oblige à s’organiser et à prendre des décisions collectivement et à distance.
Les questions qui ressortent de l’atelier :
- Plusieurs centaines de personnes ont porté la liste : Comment travailler avec le collectif ? Quel rôle donner à chacun après l’investiture ? Comment travailler avec les non-élu.e.s du collectif ?
- Les processus de démocratie directe et participative sont des processus longs. Dans une situation d’urgence, comment prendre des décisions en alliant démocratie et efficacité ?
- Comment stimuler la participation sur toute la durée du mandat ?
- Comment gérer cette période de transition en confinement, 1) avec le/la maire sortant qui fait de la rétention d’information, 2) comment réfléchir et s’organiser à distance 3) comment informer les habitant.e.s que nous n’avons pas encore pris nos fonctions ?
- Comment travailler en intelligence avec la minorité sortante ?
- Comment s’associer à des listes et communes participatives autour ?
- Comme gérer notre place minoritaire dans notre communauté de communes ? Quels outils, méthodes, … ?
Atelier 3 : Élu.e.s dans l’opposition, quel rôle au sein de la municipalité ?
- Quelles communications ?
— Comment organiser la publicité de nos mesures ? Comment faire savoir à l’extérieur qu’on a proposé des alternatives ?
— Quelle place pour l’opposition dans le magazine municipal ?
— Il faudra porter à la connaissance des habitant.e.s ce qu’est la vie municipale et du poids que les habitant.e.s peuvent avoir. - Comment travailler la participation citoyenne avec les habitant.e.s ?
— Besoin de formation pour animer et engager une participation plus active et plus large des habitant.e.s
— Proposition d’1/2 heure citoyenne pendant le conseil municipal (si refus : on contacte les médias)
— Porte à porte, réunions ateliers thématiques, réunions, des actions sur le marché
— Comment éviter que ce soit toujours les mêmes qui participent ? (entre-soi)
— Proposer qu’une des commissions municipales soit participative - Comment travailler la participation avec le conseil municipal ?
— La participation des élu.e.s d’opposition avec le restant des élus (quels outils de travail plus participatifs?), la participation à des commissions
— Comment le faire quand il y a une forte opposition de valeurs avec la majorité ou que le besoin de participation n’est pas partagé ?
— Comment être force de proposition (notamment pour les sujets/dossiers déjà très travaillés avec les habitant.e.s à l’extérieur de la municipalité) ?
— Quels sont les outils/leviers/procédures en interne à la municipalité qui ouvrent des possibilités de participation ?
— Proposition de profiter du temps du confinement pour faire connaissance avec les élus majoritaires. - Comment mettre en place la transparence ?
— Ex : rendre public le règlement intérieur, filmer les séances du conseil municipal… - Quelle formation pour les nouveaux élu.e.s ?
— à l’animation et la participation citoyennes/habitant.e.s sur :
– les sujets juridiques
– les sujets budgétaires (budget 2020)/débat d’orientation budgétaire
– le compte-administratif
(Info : voir Association ALEO (www.aleo.info) pour formation élus d’opposition) - Quelle stratégie d’opposition ?
— Avec les autres élu.e.s de l’opposition ?
— Stratégies : Contre-pouvoir ? Opposition ? Participation aux commissions ?
— Comment se positionne-t-on ? - Comment soutenir le travail de l’opposition ?
— Constituer un groupe de soutien qui appuie le travail des élus d’opposition
— Instaurer une rotation tous les 2 ans tout en s’assurant que les prochain.e.s élu.e.s sont déjà au fait des dossiers
— Faire le lien avec les associations - Besoin de mutualisation/partage/mise en lien des expériences ou des recherches sur des points précis.
— Règlement intérieur, délégations, commissions, communication (newsletter tous les mois, blog). Que l’on ne s’épuise pas à faire chez les uns ce qui est fait chez les autres.
— Besoin d’ateliers pour aller dans le détail
— En Gironde, les listes se sont réunies pour partager leurs expériences, compétences, animateurs et profiter de celles et ceux qui sont déjà formés, et préparer les départementales.
Les questions qui ressortent de l’atelier :
- Quelle stratégie pour l’opposition ? (Ex : quelle alliance avec les autres forces d’opposition ? Quel positionnement dans les travaux ou commissions proposés par la majorité ? Quel rôle de contre-pouvoir, comment et avec qui ?
- Comment forme-t-on ces nouveaux élus de l’opposition ? Sur les question techniques, les budgets municipaux, la procédure, la loi ?
- Comment ouvrir la majorité en place et aux habitants à une culture de la participation, à une nouvelle manière de faire la politique ?
- Quels moyens de communication mettre en oeuvre pour permettre un maximum de transparence entre l’intérieur et l’extérieur de la mairie ?
Atelier 4 : Ceux qui vont au second tour, quelles stratégies ?
- Alors qu’à priori, l’objet de cet atelier allait porter principalement sur les questions d’alliances en vue du second tour et de la technicité des contrats de mandatures, il en a été tout autre. Les principaux questionnements des participants portaient sur la capacité du collectif ou de la liste à prendre des décisions dans ce contexte de confinement, la peur de mal agir dans un contexte inédit et imprévisible.
- En temps de crise, l’équilibre entre la verticalité et horizontalité : comment décide-t-on collectivement à distance, alors que certains sujets se placent dans le temps court ?
- “Compliqué de continuer la campagne dans un contexte où il faut plus que jamais mesurer ses mots / jugements / critiques… besoin de décence et de délicatesse. Le virtuel n’est pas toujours facile pour s’exprimer avec justesse!”
- Est-ce décent de faire campagne en temps de crise ? Certains arrivent à bien rester présent sur les réseaux sociaux, en décidant de ne pas forcément faire campagne mais plutôt de parler de solidarité et d’entraide.
Les questions qui ressortent de l’atelier :
- En temps de crise, quel est le rôle et quelle responsabilité a la tête de liste (dans un schéma de gouvernance horizontal) ?
- Si une fusion entre deux listes se prépare, et que finalement les élections du 1er tour sont annulées, faut il repartir à zéro, ou fusionner ?
- Alors que le porte à porte et les ateliers collectifs sont des méthodes très utilisées par les listes participatives, quelles alternatives à ces formats en période de confinement ? Comment faire campagne en ligne ?
- Comment maintenir le lien du travail en équipe en période de confinement, quels outils de travail à distance utiliser pour faire campagne et mobiliser les électeur ?
Atelier 5 : Repenser les stratégies municipalistes dans le contexte de crise actuel.
- “Nous sommes habitués à nous réunir toutes les semaines (40 participants à chaque fois en moyenne), on fonctionne de façon collégiale et là, on se sent un peu démunis parce qu’on ne peut plus se rencontrer physiquement”.
- “Cette crise nous fait réfléchir à la nécessité de mettre en avant les communs, la transparence de l’information, rétablir la confiance avec la population.”
- “La crise nous montre la stratégie de choc (Naomi Klein) à laquelle nous sommes confrontés et nous impose la crainte, le repli et la défiance. Le municipalisme reprend du sens dans cette dimension pour recréer du lien et des communs. L’enjeu est de pouvoir partager les expériences (notamment de crises) et se relier.”
- Communiquer sur la force des listes participatives et leur nombre dans le paysage national. Dans le cadre de la campagne (et une fois au pouvoir), construire des narrations sur des situations concrètes et qui démontrent notre capacité à agir efficacement en cas de choc.
- Agir sur les questions d’autonomie alimentaire : AMAP, commandes groupées avec les producteurs locaux, coursiers solidaires (Annecy) pour livrer les personnes les plus vulnérables.
- Se mettre au service de réseaux solidaires d’entraides durant cette période, construire des formations sur la gestion de crise au sein des administrations et collectifs citoyens (autonomie alimentaire, expulsion logement, questions économiques, soutien aux personnes âgées…). => Création d’un réseau d’entraide ?
- Dans des contextes de crise, les structures comme le planning familial peuvent être d’une aide importante pour soutenir les familles monoparentales, les femmes victimes de violences.
- Les conciergeries de quartiers sont des modèles inspirants pour soutenir la solidarité d’hyper-proximité.
- Un des principaux enjeux est alimentaire : de nombreuses alternatives pour répondre à la crise sanitaires se développent comme la livraison de paniers, une aide solidaire avec les personnes âgées