Quimper : interview de l’équipe municipale
16 octobre 2020
Lors d’une formation-action sur la gouvernance partagée à Quimper, nous avons interviewé des membres de l’équipe municipale au sujet de la transformation des pratiques politiques dans la mairie.
“Je suis ingénieur dans une usine. Pour résoudre un problème, par exemple sur un défaut dans la chaîne de fabrication, la solution la plus simple et la moins coûteuse est d’aller voir chaque personne concernée de près ou de loin par le processus et de les associer à la résolution du problème. La posture d’expertise est beaucoup moins efficace que celle de la co construction. C’est exactement la même chose pour la démocratie !” Uisant Créquer, adjoint chargé au renouvellement démocratique à la mairie de Quimper.
Ann, retraitée de la fonction administrative territoriale, ex co-directrice de campagne de la liste Quimper Ensemble.
Quelle est ton parcours de vie ? Pourquoi t’es-tu engagée en tant que non-élue dans le groupe majoritaire de la ville de Quimper ?
J’ai commencé ma carrière en tant qu’agent d’entretien à la commune de Saint-Brieuc. Et je l’ai fini en étant directrice générale adjointe des services au conseil départemental des Pyrénées Atlantique. J’ai gravis les échelons, passé les concours. J’ai acquis petit à petit, au fil de mes expériences, la certitude que la démocratie locale est la bataille la plus importante à mener si l’on veut aller vers plus de justice sociale et d’écologie.
Pourquoi est-ce si important de transformer la démocratie ?
On voit aujourd’hui où les décisions autocratiques nous ont mené : dans le mur. Quand on décide en collectif, quand on prend le temps d’aller chercher la diversité des points vues et des expertises, nos décisions sont infiniment plus riches et plus justes. En plus, ça apporte une sérénité dans les débats et dans les décisions qu’on ne peut jamais avoir en décidant seul.e ou à quelques-un.e.s.
Quel est pour toi la première étape essentielle à votre travail sur la démocratie locale à Quimper?
On ne peut pas concevoir une dynamique de démocratie locale sincère sans travailler d’abord la gouvernance interne au sein du groupe d’élu.e.s et avec les agents municipaux. J’attends donc qu’on formalise un processus de décision clair, ouvert et transparent, qu’on respecte ce processus et qu’on le fasse évoluer régulièrement lors de la mandature pour intégrer directement les habitants aux décisions des projets pour la ville.
À part le sujet de la démocratie, quel est le projet de votre collectif qui te tient le plus à cœur ?
Avec Quimper Ensemble (liste majoritaire de la maire de Quimper) on veut mutualiser l’utilisation des bâtiments publics, aller vers une gestion collective de ces biens, retravailler les usages. Les cours d’écoles sont vides une grande partie de l’année, les gymnases aussi, même la salle du conseil municipal n’est utilisée que quelques fois par an ! C’est un projet essentiel pour stopper les constructions inutiles et la bétonisation de la ville. Un projet ne peut réussir sans un vrai processus de concertation et de co décision entre les habitant.e.s, les usagers, les agents qui gèrent les structures et les élu.e.s.
Uisant Créquer, 29 ans, adjoint chargé au renouvellement démocratique
Qu’est-ce que la liste Quimper Ensemble a de si spécial ? Pourquoi t’y es-tu engagée ?
J’ai rejoint la liste pour travailler le renouveau démocratique de la commune. J’ai travaillé notamment sur la composition des candidat.e.s de la liste. On a commencé par un processus de définition des qualités et des compétences attendues des candidat.e.s. Puis on a travaillé sur la recherche de mixité grâce à des critères de catégorie socio-professionnelles, en étudiant les lieux d’habitations dans les quartiers de la ville, le pourcentage de non-encartés, etc. Au début, on a rencontré une réticence des membres de partis politiques et d’Isabelle Assih, notre tête de liste qui est l’actuelle maire de Quimper. Puis ils ont fini par lâcher prise et oser expérimenter de nouvelles méthodes. C’est cette capacité à oser faire différemment qui m’a convaincu.
Pourquoi est-ce si important de transformer la démocratie ?
Je suis ingénieur dans une usine qui fabrique des filtres à air pour les voitures. Dans mon métier je me suis vite rendu compte que la posture d’expertise est beaucoup moins efficace que celle de la co construction. Pour résoudre un problème, par exemple sur un défaut dans la chaîne de fabrication, la solution la plus simple et la moins coûteuse est d’aller voir chaque personne concernée de près ou de loin par le processus et de les associer à la résolution du problème. C’est exactement la même chose pour la démocratie ! C’est au local, avec les personnes concernées qu’on a la plus grande capacité d’action et la plus fine analyse des problématiques. Ils faut qu’on arrive à associer directement les habitant.e.s dans la résolution des problèmes et à la construction des projets pour la ville si on veut être efficace et vertueux.
La politique se cache derrière toute chose dans la vie. Il faut créer le cadre qui nous permette, nous les citoyens, de se saisir des sujets qui concernent nos vies et notre avenir. Pour moi, la démocratie (si elle va chercher la mixité et qu’elle est bien organisée) est vertueuse par nature parce qu’elle permet le débat d’idée et donc la réappropriation des sujets qui nous concernent. Je suis intimement convaincu que si on organise le débat avec les bonnes méthodes, les bons outils, logiquement les habitants prendront des mesures en faveur de l’écologie et contre les injustices sociales.
Article rédigé par Thomas Simon.